En 1942, les actes de sabotage contre l’occupant nazi se multiplient à Nantes. Trente-sept Communistes seront fusillés à l’issue du « Procès des 42 ». Parmi eux, cinq Républicains espagnols.

La transmission de cette histoire est essentielle à l’heure où les derniers témoins disparaissent, à l’heure ou l’histoire subit une uniformisation dangereuse.

A l’occasion du 70e anniversaire du « Procès des 42 », l’ACER a été et mise à l’honneur samedi 16 février à Nantes où Cécile Rol-Tanguy a inauguré une rue portant les noms de deux victimes de la barbarie Nazie,  et dimanche 17 février à La Chapelle Basse Mer au carré des fusillés Espagnols ou Manuel Duran prononça l’allocution du 70 anniversaire.

 

 

                                                                                                                                                                                                                                                                     Photos Patrice Morel

Cécile Rol-Tanguy dévoilant la rue  Louis et Louise LE PAIH.

 

 

Allocution de Monsieur Joël Busson Président du comité du souvenir

Monsieur le Maire, Monsieur le Préfet, Chères familles de fusillés, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs les représentants des associations patriotiques, Mesdames Messieurs,

Ici même, plongés dans la semi-obscurité de ce sinistre champ de tir du Bêle, plus de 80 résistants sont tombés sous les balles nazies.

Souvent jeunes, comme ceux du procès des 42 avec une moyenne d’âge de 30 ans, très jeunes comme André Rouault, aîné de Guy Moquet d’un mois à peine. Nous rendons particulièrement hommage aujourd’hui aux FTP des procès des 42 et des 16, pour le 70e anniversaire de leur sacrifice. Cette cérémonie, avec l’appel aux morts, des 82 noms, marque notre volonté de n’oublier aucun d’eux dans l’indissociable souvenir et la reconnaissance qui leur sont dus.

Commémorer leur engagement, leur combat, pour la liberté constitue un devoir contre l’oubli, un devoir envers les générations nouvelles afin qu’elles sachent que résister dans les pires conditions est toujours possible, indispensable lorsqu’il s’agit de défendre les droits essentiels de l’homme, les valeurs de liberté, de démocratie, de paix.

Enseigner l’histoire de ces résistants est le but de notre travail de mémoire, cette histoire si absente des programmes scolaires et des productions des grands médias. De plus pour certains, il faudrait aujourd’hui la dissoudre, l’amalgamer, avec celle d’autres conflits, y compris coloniaux, l’uniformiser dans un mémorial Day à la française. Nous ne pouvons aucunement souscrire à une telle perspective qui conduirait à brouiller les valeurs, à accentuer la perte des repères indispensables à la formation de citoyens conscients, capables d’êtres autonomes, solidaires et libres.

L’oubli, disait Eluard, est le second linceul des morts. Que serait, sans les différentes associations mémorielles présentes aujourd’hui, la mémoire de la résistance et de la déportation. La remise en cause régulière des grandes commémorations nationales patriotiques a pour but de les banaliser, de les vider de leur sens historique et des valeurs qu’elles portent.

C’est dans des moments comme ceux que nous vivons ce matin, lors des hommages rendus à ces hommes à ces femmes, qui bien que minoritaires résistèrent à la force bestiale qui semblait tout submerger, que nous mesurons mieux la nécessité d’une approche historique qui fait réflexion par l’analyse des causes et de l’enchaînement des faits.

Comment comprendre le sacrifice de Louis le Paih, de Claude Millot, dont les rues qui entourent ce lieu porteront désormais les noms ? Comment le comprendre en occultant le vécu de chacun d’entre eux : le contexte dans lequel se sont construite leur personnalité, avec les bonheurs des luttes de 1936, mais aussi les inquiétudes lors de l’écrasement de la République espagnole, leur colère face à la non intervention, la mobilisation contre la montée du fascisme en Europe avec son cortège de violences racistes et antisémites ? Comment comprendre le sacrifice en occultant la honte et la révolte face à la débâcle, l’effondrement de la France, l’assassinat de la République voulue par une bande d’affairistes préférant Hitler plutôt que le Front populaire.

Photos Patrice Morel

 

Oui, il est important d’inaugurer encore aujourd’hui des plaques de rues qui incitent à la réflexion et fassent appel à la mémoire. Nous souhaitons que d’autres noms de rues viennent enrichir ce travail de mémoire. Pendant longtemps oubliés des commémorations officielles, ces Résistants ne le furent jamais des milieux populaires d’où ils étaient issus. Probablement leur appartenance politique gênait, contredisait certains dogmes et rappelait à certains notables leur passé pendant l’occupation.

Oui, il aura fallu attendre le 60e anniversaire de leur exécution pour que chaque année, un hommage officiel leur soit rendu. Nous le devons à notre action et à notre travail mémoriel, à l’écoute et à l’engagement voici 10 ans devant les familles et les derniers compagnons de ces Résistants, du Député-Maire de Nantes Jean Marc Ayrault aujourd’hui Premier Ministre. Nous lui renouvelons notre reconnaissance.

Monsieur le Maire, il nous faut aujourd’hui poursuivre ensemble ce nécessaire travail de mémoire. Le Bêle change, votre travail de bâtisseur du Nantes du 21è siècle,sort ce lieu de son isolement. Il n’est plus un terrain aux marges de la ville. Il devient un quartier jeune et agréable. Ce lieu de mémoire, au coeur d’habitations nouvelles, évoque,avec l’oeuvre de Jules Paressant et le totem mémoriel, les 50 otages mais nous la référence, mis à part cette plaque, aux autres Résistants ici martyrisés reste des plus discrète

L’appel des noms de tous les fusillés, avec le talent et l’humanité de Claudine Merceron et Martine Ritz à l’instant, soulève notre émotion. Mais au-delà de celle-ci, l’approche historique est nécessaire afin d’analyser, de comprendre le courage de chacun de ses hommes et femmes et leur détermination face aux sbires de Vichy, face à la Gestapo.

C’est cette approche historique, avec la prise en compte des engagements respectifs de ces militants politiques ou syndicaux dans un contexte de chasse aux communistes conduite sous le prétexte du pacte germano-soviétique, ce sont les enseignements tirés de ce chemin parcouru, avec ses souffrances et sacrifices, qui nous aident à cerner comment la Résistance a pu grandir année après année, jusqu’à la réalisation de son unité.

La création du Conseil National de La Résistance sous l’autorité de Jean Moulin et dont nous célébrons cette année le 70è anniversaire , fait encore référence. Le CNR permit au pays de préparer sa libération avec le concours des Alliés, de redonner à la France sa place dans le concert des nations, en se dotant en 1944 d’un programme novateur de progrès social et d’avancées démocratiques, économiques et politiques, s’émancipant des forces de la finance qui avaient sombré dans la collaboration. Un programme ambitieux de reconstruction du pays et de conquêtes sociales, comme la sécurité sociale dont nous bénéficions aujourd’hui ou le droit de vote pour les femmes...

Photos Patrice Morel

 

Expliquer ce qu’un pays a été capable de réaliser alors qu’il devait se relever d’un champ de ruine, n’est-ce-pas démontrer que répondre aux attentes sociales des citoyens, organiser leur participation aux décisions ne constituent pas un handicap, mais au contraire une solution pour surmonter les problèmes avec plus d’efficacité qu’une gestion dont la finalité est le profit d’une minorité et l’austérité pour les autres.

Quelles leçon aussi pour aujourd’hui, cet espoir qui jamais ne les avait abandonné ! Et jusqu’à l’aube de leur exécution, la certitude de la victoire, si forte dans leur ultime lettre d’adieu. Conviction renforcée par les nouvelles de la défaite des nazis à Stalingrad, qui malgré tout leur parvenaient au fond des cachots.

Enseigner les pages d’histoire écrites de leur sang, les raisons de la montée du fascisme et du nazisme, c’est interpeller les consciences devant la banalisation des idées nauséabondes, des populistes et néo-fascistes, nationalistes, racistes, xénophobes alimentés en période de crise par les frustrations, la paupérisation, les peurs entretenues. Ces entreprises de banalisation de l’extrême droite n’épargne pas La France.

Oui, le ventre de la bête immonde est encore fécond. En Europe, l’extrême droite détient une quarantaine de sièges au parlement à Strasbourg et est présente dans seize assemblées nationales avec des scores frisant les 30% en Pologne. Ses idées sont au pouvoir en Hongrie, où paradent ses groupes para-militaires. La liberté de la presse y est ouvertement remise en cause. Des communautés y sont discriminées pour leur appartenance ethnique. Des statues au dictateur Horthy, allié d’Hitler et de Mussolini y sont érigées. Hélas nous pourrions multiplier les faits qui constituent autant d’alertes et n’épargne pas La France

Rendre hommage aux combattants de la liberté, n’a donc rien de passéiste . C’est là, oeuvre nécessaire pour éveiller, mettre en garde. Aujourd’hui plus personne ne devrait dire : « je ne savais pas ». C’est l’Histoire, la connaissance des faits qui enseignent comment « Cela a commencé » dans les années 30 et comment cela s’est terminé sur notre continent dans des pays pourtant civilisés.

Rappeler le parcours de Paolo Rossi, de Gerson Kramnitzki, d’Armand Feldmann, de Simon Bronstein, de Jacques Jorissen de Victor Ruiz de Siefried Holzmann, celui de Benedicto Blanco Dobarro, de Basilio Blasco Martin, d’Alfredo Gomez Olléro, d’Ernesto Priéto Hidalgo, de Miguel Sanchez Tolosa, unis à leurs camarades français jusqu’à leur dernier souffle, c’est enseigner la grandeur humaine du refus d’un repli communautaire mutilant. Ces étrangers, nos frères pourtant, chantait justement le poète, n’étaient un danger que pour l’envahisseur, mais un apport enrichissant pour la France combattante et son peuple. Se souvenir, lutter contre l’oubli, contre l’abandon de l’enseignement de l’histoire à l’école, démontrer que l’identité d’un être humain est bien autre chose que son appartenance à tel où tel groupe, c’est s’élever face à l’obscurantisme, c’est œuvrer afin que l’humanité ne revive plus les catastrophes humanitaires des guerres engendrées par les forces fascistes de l’axe et les affairistes qui les financèrent en attendant le retour sur investissement sur le dos des peuples.

Photos Patrice Morel

 

L’Allocution de Patrick RIMBERT ; Maire de Nantes

Mesdames, Messieurs, Nous sommes réunis ce matin pour commémorer ensemble le 70ème anniversaire de l’exécution, par les Nazis, des résistants condamnés lors du procès des 42 et du procès des 16 et, à cette occasion, inaugurer la rue Louis et Louise LE PAIH.

Vous êtes nombreux à connaître ces évènements tragiques. Je crois pourtant nécessaire d’en rappeler les grandes lignes, car ils donnent sens à notre rassemblement d’aujourd’hui.

Très rapidement après la défaite, la Résistance s’est organisée à Nantes. Peu de villes ont connu une activité si intense contre l’occupant : sabotages, attentats, constitution de réseaux de renseignements, très précieux pour les Alliés, fabrication de faux papiers, distribution de tracts….. C’est naturellement un motif de fierté pour nous tous. La Nation nous a d’ailleurs exprimé sa reconnaissance en faisant de Nantes une des cinq communes françaises à qui a été attribué le titre de Compagnon de la Libération. Mais que de souffrances pour cela parmi la population, que d’actes d’abnégation, de courage et même d’héroïsme aussi. Car c’est bien d’abnégation, de courage et d’héroïsme qu’il faut parler à propos de ceux dont nous honorons ce matin la mémoire.

Les deux procès n’ont pas tout à fait la même histoire, mais ils révèlent la même chose : que le courage et l’idéalisme, un instant broyés par la tyrannie et la force brutale, peuvent triompher grâce à des hommes et des femmes d’exception.

 

Cecile Rol-Tanguy en discussion avec Patrick Rimbert Maire de Nantes

Le procès des 42 fait suite à l’arrestation, durant l’été 1942, d’un important et très actif réseau FTP, opération organisée conjointement par les Allemands et, hélas, la police de Vichy. Cette participation de Français rend encore plus douloureux cet épisode de notre histoire, mais elle ne doit pas être occultée car, comme l’a rappelé François Hollande dans son discours du 22 juillet dernier, à propos de la rafle du Vel d’Hiv, si « la vérité est dure, cruelle », l’implication de Français ne doit pas faire oublier que de tels actes furent "aussi un crime contre la France, une trahison de ses valeurs. Ces mêmes valeurs que la Résistance, la France libre, les Justes surent incarner dans l’honneur". L’occupant choisit alors de faire du procès de ces Résistants, qui étaient en fait 45, tous communistes, un instrument de terreur à l’égard de la population. Rien ne fut négligé : salle d’audience tendue de drapeaux à croix gammée, presse aux ordres largement conviée et bien sûr iniquité du procès, au cours duquel tout fut fait non seulement pour faire condamner, mais aussi pour salir les accusés, présentés comme des criminels de droit commun, rejetés de la masse des Français. Face à cela, les prévenus ont conservé une attitude très digne, chantant même La Marseillaise, devant leurs juges éberlués, juste après le verdict qui condamnait la plupart d’entre eux à la mort. Dès le lendemain, avant même que le délai de dépôt du recours en grâce ait expiré, 9 d’entre eux étaient fusillés au Bêle. Les autres suivront, les 13 février et 7 mai.

Je tiens à souligner la présence, parmi les condamnés, de cinq Espagnols, Républicains arrivés en France suite à la victoire du Franquisme et qui se sont engagés dans la Résistance sur notre sol. Ils s’appelaient : Alfredo GOMEZ-OLLERO, Benedetto BLANCO, Basilio BLASCO MARTIN, Miguel SANCHEZ et Hidalgo PRIETO. Il me semble important de le rappeler, car leur engagement est particulièrement exemplaire. Chassés de leur pays, pas toujours, hélas, bien accueillis en France, où nombre d’entre eux ont été installés dans des camps sommaires et la plupart souvent tenus en suspicion, ils ont dépassé tout ceci pour reprendre leur combat contre le fascisme et son abjection, comprenant bien que c’était le même combat pour les valeurs de liberté et d’humanité qui se poursuivait. Leur contribution à la lutte sur notre territoire fut loin d’être négligeable : on estime qu’il y avait environ 60 000 maquisards espagnols dans le Sud-Ouest en 1944, où ils libérèrent seuls la ville de Foix. Au total, 12 000 républicains espagnols seront acheminés vers des camps de concentration ou de travail entre le 6 août 1940, qui marque le premier départ vers Mauthausen, et mai 1945

Le procès des 16 s’est tenu pour sa part en août 1943. Toujours intenté à des résistants communistes, il sera aussi discret que celui des 42 avait été retentissant. Mais sur le fond, rien ne change : l’instruction et les audiences sont une mascarade, la mort sanctionne pour la plupart le passage devant ces juges si éloignés de la justice.

Bien sûr, l’un comme l’autre de ces procès ont échoué. Non que les inculpés aient pu échapper à un sort funeste : 37 exécutions à l’issue du premier procès, 13 lors du second. Mais loin de briser la volonté de résistance de la population, ils ne feront qu’attiser sa haine des Allemands. D’autres hommes et femmes prendront le relais des morts glorieux, illustrant les paroles du champ des partisans : "Ami, si tu tombes, un ami sort de l’ombre, à ta place". D’ailleurs, tout y poussait : le régime de Vichy montrait de plus en plus clairement son visage d’odieux vassal du nazisme, notamment à travers l’instauration du STO, tandis qu’après Stalingrad et le débarquement allié en Afrique du Nord, l’espoir changeait de camp.

Photos Patrice Morel

 

On pourrait imaginer que ces deux procès aient fortement marqué les consciences et fait l’objet, dès l’après-guerre, de larges commémorations. En fait, il n’en fut rien. Sans doute à cause du retentissement de l’exécution des 50 otages, qui a occulté tous les autres crimes de guerre dans notre région, peut-être aussi, en cette période de guerre froide, du fait de l’appartenance exclusive des condamnés au PCF, il faudra attendre 2003 pour qu’un véritable hommage officiel leur soit rendu, même si, dès 1993, la Ville de Rezé, qui honorait déjà régulièrement, ses 13 victimes avait entrepris de sortir leur mémoire de l’oubli. Nous n’avons bien sûr pas à juger de cette trop longue occultation, mais nous pouvons que la regretter, car l’héroïsme ne se graduant pas, la reconnaissance et l’hommage qui lui sont dus ne peuvent être comptés. Il faut donc remercier tous ceux, en particulier le collectif "Procès des 42", qui ont lutté pour que cesse cette injustice.

Notre rassemblement de ce matin vise à poursuivre la réparation de cet oubli, désormais bien entamée, par la cérémonie elle-même et l’inauguration de la rue Louis et Louise LE PAIH. A travers ces deux personnalités exceptionnelles, c’est en effet à tous leurs camarades, morts avec eux, pour la même cause et pour les mêmes idéaux, morts ensemble parce qu’ils refusaient la même abjection, que nous rendons hommage. Ce que je sais d’eux me rend certain que c’est ce qu’ils auraient désiré. Ce sont en effet des gens dont l’engagement n’est pas le fruit du hasard, mais bien d’une histoire personnelle au service de l’amélioration de la condition humaine, en particulier des travailleurs. Louis Le Paih était, avant-guerre, l’un des responsables nantais du syndicat CGT du bâtiment. A ce titre, il a été l’un des dirigeants de la grève nantaise du bâtiment en 1938. A partir de 1939, il a travaillé à l’entreprise des Batignolles qui fabrique des locomotives. Cette entreprise où les militants communistes sont nombreux et très actifs est passée sous contrôle allemand à partir de l’été 1940.

Dès 1941, la police nantaise est chargée d’arrêter Louis LE PAIH en tant que militant communiste. Il passe alors dans l’illégalité et devient rapidement l’adjoint de Jean Vignau-Balous, interrégional militaire de "l’Organisation Spéciale" (OS) pour tout l’Ouest de la France. Avec ses camarades des Batignolles (Auguste Chauvin, Raymond Hervé, Gaston Turpin), il participe directement à de multiples sabotages. Après les arrestations de l’été 1942 qui ont totalement décapité la résistance communiste tant du point de vue militaire que politique, il joue un rôle essentiel dans sa réorganisation. Dès novembre, un groupe est opérationnel et sa première action est un coup d’éclat. En effet, le 14 novembre 1942, ce groupe FTP attaque les Allemands devant le cinéma Apollo, faisant un mort et plusieurs blessés graves. D’autres actions suivront, comme le sabotage en janvier 1943 du pont tournant du Grand Blottereau, mis hors d’usage pour plus d’une semaine. En deux mois, le bilan est impressionnant. Mais ce nouveau groupe est, lui aussi, très vite identifié et démantelé.

 

Cecile Rol-Tanguy et Jean Chauvin fils d’Auguste Chauvin fusillé                     Cécile Rol-Tanguy Robert Créange, président de la F.N.D.I.R.P. Mr Rimbert Maire de            Nantes, et Joël Busson Président du Comité du souvnir des fusikllés de Chateaubriand et de la Résistance en Loire Inféieure.

Le 12 janvier 1943, Louis LE PAIH est appréhendé et les Allemands essaient de le faire parler afin de compléter l’instruction du « Procès des 42 ». Il ne dit rien à la police, guère plus aux juges, à qui il lance simplement : "Au tribunal allemand, je n’ai aucune déclaration à faire". Évadé lors d’un transfert en gare de Nantes le 3 mai 1943, il est repris le 5 et fusillé. Il n’avait que 31 ans et était père de trois enfants.

Durant toutes ces luttes, il a pu compter sur le soutien indéfectible de son épouse, Louise, qui partageait ses convictions et n’a pas plus que lui hésité à mettre sa vie en danger pour les défendre. Elle a par exemple joué un rôle actif dans l’évasion de son mari, en établissant le contact entre celui-ci et les FTP.

On est toujours profondément ému lorsque l’on évoque ces figures, car leur vie est une leçon. Rien ne les préparait plus que d’autres à ce qu’ils ont accompli. Mais ils avaient des convictions, une fois en l’homme, l’espoir de voir s’améliorer sa condition et peut-être son esprit. Ils y croyaient si fort qu’ils y ont consacré leur vie et qu’ils l’ont mise en danger pour cela. C’est finalement, je crois, ce qu’il faut retenir de leur exemple : il est donné à chacun, il faut simplement avoir le courage de l’engagement. Puissions-nous, en ces temps heureusement moins troublés et dramatiques que ceux qu’ont vécus Louis et Louise LE PAIH, ne pas l’oublier et nous efforcer d’y être fidèles.

Je vous remercie.

 

 

 

 

Photos Patrice Morel                                     Carlos Fernandez, Hubert Doucet, Pascal Barras, Manuel Duran.

                                                                     Allocution de Manuel DURAN, Délégué Régional de l'ACER

Monsieur le Maire de La Chapelle Basse-Mer, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs les membres des familles de nos résistants espagnols, Mesdames et Messieurs les représentants des Associations, Syndicales et Politiques et des Associations des Anciens Combattants, Chers Amis, Je veux tout d’abord remercier le Comité Départemental du Souvenir des Fusillés de Châteaubriant et Nantes et de la Résistance en Loire Inférieure, de donner l’occasion à l’ACER, -les Amis des Combattants en Espagne Républicaine- association héritière de l’AVER l’Amicale des combattants volontaires en Espagne Républicaine, plus connus sous le terme d’anciens Brigadistes. Merci de nous donner la parole lors de cette commémoration du 70 ème anniversaire du procès des 42 et plus spécialement aujourd’hui, pour évoquer la mémoire des résistants espagnols, résistants sur le sol de France, et qui ne faisaient que continuer le combat commencé, quelques années plus tôt contre le fascisme et la liberté en Espagne Républicaine. Modestement, l’ACER peut dire que nous sommes les héritiers d’hommes qui ont forgé de par leur engagement, au péril de leur vie une histoire commune, une histoire partagée, avec les résistants espagnols. Le coup d’état du général Franco le 18 juillet 1936, contre la jeune République Espagnole, et son agression par les futures forces de l’axe , l’Italie Fasciste de Mussolini, l’Allemagne Nazi de Hitler, le Portugal de Salazar qui apporta d’énorme moyen logistiques, et d’autres contingents plus petits, comme des irlandais et des polonais, des russes blancs, sans compter sur les troupes de choc composés par les marocains, toutes ses forces n’avaient qu’un seul objectif, combattre la démocratie, restaurer une gouvernance aux mains des grands propriétaires.

 Photos Patrice Morel

Pose de la gerbe de fleur par Georges Bertrand Puig

En Espagne et de par le monde, des femmes et des hommes se sont soulevés et ont essayé au péril de leur vie de repousser ce coup d’état des factieux, de défendre les valeurs de la démocratie, de la liberté, de combattre le fascisme international. Dès le 18 juillet des démocrates étrangers présent à Barcelone pour participer aux Olympiades, participèrent à la défense de la République et contribuèrent ainsi à mettre avec le peuple catalan hors d’état de nuire les troupes rebelles. L’agression de la République espagnole sera l’occasion pour ces jeunes révolutionnaires de prendre une part active au combat contre le fascisme et ils s’y engageront corps et âme. Dans les Brigades Internationales dès le mois d’octobre, ils participeront aux côtés de l’armée républicaine espagnole comme troupes de choc dans toutes les grandes batailles pour sauver la République, ils seront reconnus pour leur courage au combat, leur moral combatif, leur conscience politique élevée. Si les volontaires français sont de loin les plus nombreux, il y avait également 52 autres nationalités.  Benédicto, Basilio, Alfredo, Ernesto, Miguel, vous avez croisé ces hommes ! ces internationaux, venus de tous les quatre coins du monde pour vous aider, pour combattre avec vous la bête immonde. Comme vous ! des milliers ne sont pas revenus chez eux, certains sont enterrés au creux d’une tombe sans que leurs familles ne sachent ce qu’ils sont devenus, d’autres restent portés disparus. Vous avez avec eux, connu la défaite républicaine, l’internement dans les camps français dans des conditions inhumaines, avec les internationaux qui ne pouvaient plus rentrer chez eux, allemand, Italiens, Polonais. Vous avez avec eux, connu la déroute de l’armée française et l’entrée de l’armée allemande à Paris, mais votre détermination demeura intacte, comme celle des internationaux. Vous connaissiez avec eux, le fascisme et ses méthodes, et vous saviez qu’il n’y avait pas d’autre choix que de l’affronter malgré l’état de débâcle matérielle et morale de la France en 1940. Les anciens des BI et vous les Espagnols exilés de l’armée républicaine vous vous êtes retrouvés nombreux pour poursuivre le combat antifasciste sur le sol français.  

 Photos Patrice Morel

Le carré des fusillés Espagnols

Vous avez été parmi les premiers, aux côtés de militants politiques et syndicaux, à tenir bon dans la tourmente, à ne pas céder au défaitisme, et à commencer à s’organiser. Vous tous, les anciens d’Espagne, revenus ou exilés ou repliés en France vous avez compté parmi les pionniers, parmi les instructeurs expérimentés des premiers temps de la lutte armée, de la guérilla urbaine, des maquis. N’oublions pas, que les Résistants Espagnols, ont participé à la libération de nombreux départements dont l’Ariège, les Basses-Pyrénées, le Gers, le Tarn et les Pyrénées-Orientales. Les Espagnols étaient aussi présents dans les grandes concentrations de résistants : le Vercors, le Plateau des Glières, le Mont Mouchet.  Et pourtant, vous les espagnols, avant Pétain et le désastre de 40, aviez été catalogués par la 3ème République moribonde, comme « étrangers indésirables ». Comme « indésirables », certains porterons le triangle bleu dans les funestes camps nazis. Comme « indésirables » beaucoup sombreront dans l’oubli de la libération. Ici, il a fallu la volonté des élus de la Chapelle Basse Mer et le courage et l’engagement de certaines personnes au sein du « Collectif du procès des 42 » qui ont réussi avec patience à faire sortir de l’oubli nos résistants espagnols, retrouver leur familles et les honorer maintenant depuis 10 ans.

 Photos Patrice Morel

Reportage sur FR3 Pays de la Loire

Nous sommes, aujourd’hui des passeurs de mémoire, et chaque génération a sa propre responsabilité pour que ces histoires exemplaires de la Résistance ne tombent pas dans l’oubli, l’indifférence, ou même la récupération idéologique. Responsables politiques, enseignants, associations mémorielles, nous avons un devoir de mémoire pour faire connaître et vivre au présent les valeurs portées par ces combattants antifacistes, par ces combattants de la liberté.  Notre jeunesse, quoiqu’on en dise, peut s’y intéresser si la filiation avec ce qu’elle vit aujourd’hui est faite, si on va à sa rencontre pour lui parler de ces combattants en travaillant les formes du récit pour mieux les toucher. Parlons du procès des 42, communiquons autour de cet évènement, creusons ce sillon, il est fécond car à travers le parcours de ces hommes, Français et étrangers, bien des choses peuvent parler aux jeunes générations.

 

Ce qu’elles vivent aujourd’hui, la précarité sociale, l’injustice, la montée de l’intolérance et des violences, la jeunesse des années 30 les a aussi connues. La montée du populisme, la recherche du bouc-émissaire comme solution aux difficultés des peuples restent malheureusement de vieilles recettes toujours d’actualité. Notre vieille Europe n’est pas à l’abri d’une grave rechute de l’intolérance et du conservatisme, et ses instances institutionnelles ont des réactions bien molles devant les résurgences du fascisme en Hongrie et aux Pays-Bas, alors qu’elles ne trouvent pas de mots assez durs pour fustiger la population grecque, victime d’une régression sociale impitoyable. Certains discours de la droite française sur la famille, le travail, les étrangers ont des relents pétainistes.  Si les conditions historiques ne sont jamais identiques, la vigilance s’impose et nous devons la faire absolument partager.  Pour être efficaces dans ce combat difficile, les jeunes générations doivent connaître leur passé si l’on veut que, nourries de l’expérience de leurs aînés, elles inventent des formes inédites de lutte dans le combat incessant pour le progrès social et la démocratie.

 

 

 

Photos Patrice Morel                                                                                                                                                                   Photos Patrice Morel