(dimanche 14 octobre 2012 à Gourdon-Murat - Corrèze)

Quand le sumac (arbre flamboyant) rougit au-dessus de la stèle près de la maison où a grandi Damien MAGNAVAL, revient le temps de se souvenir de sa courte vie, achevée sur le Front de l'Ebre en Espagne le 21 septembre 1938, à l'âge de 33 ans.

Ils étaient là en nombre en ce 14 octobre, pour honorer la mémoire de ce militant ouvrier exemplaire, responsable syndical d'une vaillante corporation parisienne, les cochers-chauffeurs de taxi CGT. Damien, avec les 35.000 des Brigades Internationales venus de 54 pays du monde, a  écrit l'un des plus beaux chapîtres de la solidarité internationale, inédit à ce jour.

 

Les porte-drapeaux de la commune, du PCF, de l'ANACR et de l'ARAC ouvraient le long cortège menant à la stèle, suivis du maire et de plusieurs autres élus, de Gourdon, Pradines, Grandsaigne et de l'ancien maire de Tarnac. Karim ASNOUN, le secrétaire de la Chambre syndicale et de la mutuelle des chauffeurs de taxis CGT était venu de Paris avec une forte délégation que les Gourdonnais(es) sont toujours fiers d'avoir à leurs côtés. Le parti communiste était représenté par Lucien PEUCH (fédération de la Corrèze) et par Pierre LAGNITRE (section de Pradines/Bugeat); l'ANACR par Bernard BOUCHE (canton de Bugeat), Daniel ESPINAT (Chamboulive) et l'ARAC par Michel AGNOUX (St-Jal).La famille de Damien, durement touchée par la disparition récente de sa dernière soeur, Yvonne CAVALLI dite Nénette, avec la présence de ses nièces, neveu et leurs descendants, pérennisait sa mémoire.

Jacques JOFFRE, le maire, remercia l'assistance et salua le sacrifice de Damien, "tombé sur le Front de l'Ebre pour que vive la République espagnole et par-delà, la liberté en Europe et dans le monde".Karim ASNOUN rappela combien les luttes d'hier font incontestablement écho aux combats d'aujourd'hui. " C'est un honneur de prendre le relais partout où les droits de l'Homme sont bafoués"... Ensuite, Dany CLEMENCEAU-MAGNAVAL (nièce de Damien) nous fit revivre cette période de l'Histoire si utile pour comprendre le présent (extraits) :

"La guerre d'Espagne ne fut rien d'autre que la répétition générale de la seconde guerre mondiale. Derrière les insurgés nationalistes regroupés autour du général Franco, se dessine une Europe violemment antibolchévique, prête à sacrifier la démocratie. La bataille de l'Ebre fut ainsi bien plus que le combat perdu d'une guerre civile. L'Espagne des années trente est républicaine. Elle mène à bon train des réformes sociales qui entraînent un profond changement dans la société traditionnelle et catholique, en modifiant les rapports de force, en acceptant le fédéralisme, en libérant les femmes. Autour de Franco se regroupent toutes les forces réactionnairessssss, notamment l'Eglise toute puissante et son bras armé, l'Opus Dei. Cette armée d'insurgés fascistes qui refusent la sentence des urnes, va s'opposer à un front républicain hétéroclite qui rassemble communistes, socialistes, anarchistes, démocrates et des hommes de toutes nationalités comme Malraux et Hémingway venus défendre la liberté au sein des Brigades Internationales.

Les Républicains livrent batalle avec l'espoir que l'Europe va s'engager à leurs côtés. Les Brigades Internationales sont héroïques mais elles ne sont pas appuyées ou très peu par les Etats occidentaux, et l'armement peine à arriver de l'Union soviétique. En revanche, le soutien militaire des Allemands et des Italiens est massif et techniquement très avancé pour les franquistes. Une terrible guerre de position s'engage, marquée par le pilonnage de l'aviation allemande suréquipée qui rend la traversée du fleuve presqu'impossible, d'autant que la riposte aérienne des Républicains tarde à venir.Peu à peu, les franquistes plus expérimentés et surtout très bien armés, repoussent les Républicains malgré une résistance acharnée.

Le 15 novembre 1938, les chefs républicains, conscients qu'aucune aide extérieure ne leur sera donnée malgré une opinion internationale très favorable, donnent l'ordre du repli et retraversent l'Ebre à Flix en direction du nord. Le 16, ils font sauter le pont de fer pour ralentir l'avancée nationaliste et donner aux civils le temps de s'organiser. Quatre mois plus tard, ce sera l'exode général vers la frontière française et la Catalogne du Nord et la terrible épreuve des camps de réfugiés. Pendant la guerre de 1939-1945, la France se retrouve alors en première ligne et, dans les maquis, elle sera défendue contre l'occupant nazi par nombre de ces hommes qu'elle n'a pas su secourir.

Le 8 octobre dernier, des milliers d'Espagnols ont défilé à Madrid contre l'austérité... Le 13 octobre, un vent de résistance a soufflé en Europe avec la journée mondiale des Indignés (Londres, Florence, Lisbonne, Athènes...). La solidarité internationale serait-elle en marche ?"

En point d'orgue, "Le Chant de l'Ebre" (El paso del Ebro) monta dans les airs : "Comme nous avons combattu... nous promettons de résister", précédant la minute de recueillement. A la salle polyvalente, un extrait du documentaire "J'en garde la trace" de Néus VIALA, fille de républicains espagnols, présenta des vues inédites sur la bataille de l'Ebre. C'est autour du verre de l'amitié, accompagné d'une excellente tortilla, que se sont achevées ces rencontres fraternelles.


Département 19 / canton de BUGEAT / localité GOURDON-MURAT / corr. BREDIMUS Denise.