Notre camarade Lise London n'est plus.
Une
femme exceptionnelle n'est plus

(Pierre Laurent – PCF)

 

Née en 1916, à Montceau-les-Mines, de parents espagnols, Élisabeth Ricol était dotée d'un esprit d'une acuité rare qu'elle mit au service du combat pour l'émancipation humaine et contre la barbarie et l'injustice.

Jeune sténodactylographe aux usines Berliet de Vénissieux, Lise s'engage très tôt au Parti communiste français qui, dès 1934, la missionna auprès du siège du Komintern, à Moscou, où elle fit la rencontre de Dolorès Ibarruri, La Pasionaria, future secrétaire générale puis présidente du Parti communiste espagnol, mais aussi d'Artur London, un communiste tchèque qui allait devenir l'amour de sa vie et son deuxième époux, après Auguste Delaune. De ce séjour, exaltant, Lise garda cependant un goût plus qu'amer au spectacle humiliant et tragique des purges staliniennes, ne pouvant savoir qu'elle y serait elle-même confrontée quelques années plus tard, dans un tout autre contexte, en Tchécoslovaquie.

À son retour en France, à l'été 1936, Lise travaille comme secrétaire auprès du responsable de la MOI (Main-d’œuvre immigrée, section rattachée au comité central du PCF). Elle prend une part active à la mise en place des Brigades internationales de solidarité avec les Républicains espagnols, à Paris, puis à Albacete, au quartier général des Brigades internationales, auprès d'André Marty.

Ce fut un combat fondateur pour Lise et sa génération. À chacune de nos rencontres, je retrouvais en elle l'être libre, toujours aussi droit et digne, avec, dans les yeux, toute la tendresse et toute la force qui ont été siennes au long de son existence. Les épreuves traversées, les combats menés, n'ont fait que renforcer son humanité. Et grâce à elle, le monde fut à chaque fois un peu meilleur.

Rejointe à Paris par son époux, en février 1939, et jeune maman d'une fille née en février 1938, Lise est des premières à s'engager, sous les ordres d'Henri Rol-Tanguy, dans la Résistance, devenant capitaine des Francs-Tireurs et Partisans (FTP). Poursuivie par l'Occupant pour « assassinat, association de malfaiteurs et activités communistes », Lise est arrêtée en août 1942 par la police française. Elle donne naissance à son fils en prison à La Petite Roquette, puis après un passage à Fresnes et à la prison de Rennes, elle est livrée aux Allemands pour être déportée au camp de concentration de Ravensbrück. Elle s'y lie d'amitié avec Danielle Casanova et tant d'autres femmes qui n'en reviendront jamais. Les conditions inhumaines du camp de concentration, celles infligées aux membres de sa famille entière – son père, son frère eux aussi emprisonnés et à son mari, Artur, lui aussi déporté – n'auront pas raison d'elle. A La libération, Artur et Lise s'installent en Tchécoslovaquie qui doit se reconstruire ; Artur entre au gouvernement comme vice-ministre des Affaires étrangères.

L'épreuve qui les attendait en Tchécoslovaquie de 1951 à 1956 fut des plus tragiques. À ses procureurs staliniens, elle déclara : « J’étais, je suis et je resterai communiste, avec ou sans carte du Parti ». Sa résistance à la folie stalinienne prenant pour cible les anciens Brigadistes, et la solidarité des communistes français alertés par Raymond Guyot, auront raison de la terreur stalinienne. Libéré, Artur est enfin réhabilité en 1956. Revenus en France en 1963, le pays qu'ils ont libéré du nazisme et de la Collaboration, le pays qui a vu naître leurs enfants, Françoise et Michel, ils ne la quitteront plus.

« Ouvrez grands les yeux, ne vous laissez pas enfermer dans les certitudes, n’hésitez pas à douter, battez-vous contre les injustices, Ne laissez pas la perversion salir les idéaux communistes. Soyez vous- mêmes », dira notre camarade Lise London à ceux qui l'interrogeaient encore sur son engagement communiste présent.

« Ouvrez grands les yeux... soyez vous-mêmes » – Chère Lise, en chérissant ta mémoire, nous serons fidèles à ton injonction.

 

Pierre Laurent, secrétaire national du PCF

Paris, le 1er avril 2012

Lise London est décédée le 31 mars 2012